Chroniques

Le Mariage des Homos

Vous savez ce qu’il m’est arrivé il y a dix Jours ? Non, forcément, vous ne savez pas, mais, cher auditeur de pas plus haut, aussi loin d’être idiot que nombreux, tu as très bien compris que cet habile incipit n’a que pour seul but de te raconter mon histoire. Toutefois, érudit auditeur tu ignores ce que incipit veut dire.Alors laisse moi t’ouvrir l’esprit et cette parenthèse pour me la péter un peu. Incipit (ou Inkipit dans sa forme latine plus généralement acceptée par les littéraires qui se la jouent encore plus que moi) désigne les premiers mots d’un texte, d’une œuvre. L’incipit doit informer, intéresser le lecteur, l’auditeur. Parmi les plus connus, on peut trouver celui d’Anna Karénine de Tolstoï : « Les familles heureuses se ressemblent toutes, les familles malheureuses le sont chacune à leur façon. » Dans ce cas, on sait d’entrée qu’on va se taper les 1084 pages les plus drôles de l’histoire de la littérature depuis Madame Bovary. Mais retiendra-t-on l’incipit du prochain livre de DSK, honteusement pillé à Marcel Proust : « longtemps je me suis touché de bonne heure ».

Donc, si je commence par : « vous savez ce qu’il m’est arrivé il y a dix jours », c’est uniquement pour que je vous raconte ce qu’il m’est arrivé il y a dix jours. Mais autant vous dire que ce type de procédé pour introduire une histoire m’est insupportable. En fait, avec celle-ci, il y a deux autres types d’introduction que je ne supporte pas quand un mec m’interpelle.

Le deuxième préambule énervant, c’est : « je vais vous faire rire ». Quand un mec commence comme ça, moi, ça m’horripile, d’autant plus que dans ce cas là, très souvent, l’histoire me rend aussi triste que le départ de mon amie Christel de cette émission dont la complicité depuis presque 3 ans va beaucoup me manquer.

La troisième introduction face à laquelle je mets beaucoup de volonté à renoncer, c’est la sodomie. Et je dois avouer être un hétérosexuel intensément assumé. Même s’il paraît qu’en chacun de nous, il existe un coté féminin caché, refoulé, moi, à la limite je préfère disposer du coté qui fait les soldes et qui boit du Porto et du Banyuls. Effrontément hétéro, même s’il paraît, privilège masculin, qu’aucun plaisir au monde n’a d’égal que la stimulation de la prostate par un membre tiers : c’est vrai que jamais je ne me suis fait la sève étrange et pénétrante, d’une bite que j’aime et qui, même pas mal, pour reprendre Verlaine, ami de cuite promise et de promiscuité de Rimbaud. D’ailleurs, avant eux, on pensait que les homos s’emmêlaient par derrière, mais depuis Rimbaud, on sait que, aussi, « l’homo se mêle devant »…

C’est vrai, je n’ai jamais essayé, et l’idée de me débattre entre les draps et les bras d’un gars gras m’est ingrate, et pourtant je suis homophile, bon sang !!!

Car oui, je peux aimer mes contradictions comme je peux aimer des auteurs de droite, tel Antoine Blondin, tout comme un client du petit London peut parler de sécheresse, ou un partisan du front national peut écouter du Léonard Cohen en se chauffant à l’électricité.

Il y a 42 ans pile aujourd’hui, le 28 juin 1969, cela ne s’invente pas, bande d’auditeurs, érudits, certes, mais pervers, qu’un groupe de lesbiennes et gays se rebellèrent contre les forces de police dans un bar gay de New York. Les émeutes de Stonewall sont depuis considérées comme le début de la lutte pour l’égalité des droits des homosexuels. Célébrée depuis par les gaypride, baptisées aujourd’hui marche de la fierté, apparemment plus pudique que l’appellation susdite, et tu as bien entendu susdite, chers licencieux auditeur.

NY qui vient d’autoriser le mariage homo. Mais chez nous, des députés sans foi, des amputés de cœur ne veulent toujours pas les laisser se marier. Ils sont deux, ils s’aiment, ils veulent faire la connerie de se marier, et alors, ou est le crime ? Il y a débat, parce qu’il y a des cons. Par exemple, La députée UMP Brigitte Barèges lançait il y a quelques mois à propos du mariage homosexuel : « et pourquoi pas des unions avec des animaux ? ». Et moi, je dis : « et pourquoi pas !? » Les animaux, ils savent vivre, ils se posent pas tant de questions, des centaines d’espèces jouent le jeu de l’amour dans le hasard de la rencontre, dont les célèbres bonobos, nos plus proches cousins, dévergondés à en faire rougir tous les Rocco Siffredi de la terre.

Christian Vanneste, député UMP du Nord, comme quoi au nord, il n’y a pas que des corons, on peut trouver aussi des gros cons, parle « d’aberration anthropologique ». Ca veut dire quoi ? Cela voudrait dire que moi, on m’empêcherait, par aberration anthropologique, de me marier avec une femme qui a une bouche trop petite, parce que nos rapports buccogénitaux seraient contre nature ? Qu’est-ce que c’est que cette idée de classer et de juger les gens par appartenance sexuelle ? Peut-on parler d’aberration lorsque ces curieux comportement concernent d’aussi illustres personnages que Montaigne, Cervantes, Shakespeare, Voltaire, Goethe, Balzac, Flaubert, Oscar Wilde, Blum, Chopin, Ravel, Léonard de Vinci, James Dean, Gauguin, Colette, Yourcenar, Greta Garbo, Marlène Dietrich, et même, oui, messieurs qui dans les années 80 alors que vous n’étiez qu’un jeune homme à la découverte du monde et d’un paquet de kleenex devant ces deux gros ballons gonflables dans une piscine californienne, même Samantha Fox… Boys boys boys… Tous des pédés…

C’est quoi leur problème ? Notre héritage d’une éducation religieuse encore ancrée dans nos inconscients. C’est vrai, l’ancien Testament, condamne sans aucune ambiguïté l’homosexualité : on peut en effet lire dans le Lévitique 20,13 . »Si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable ; ils seront punis de mort ».

Toutefois dans le même lévitique, on nous parle de harem, donc de polygamie, idée acceptée par l’ancien testament. Mais l’affaire semble étouffée, et rien d’étonnant à ces textes misogynes quand on sait que déjà, à l’époque, parmi ceux qui écrivaient les lois, les testaments, qui participaient aux festins de Jésus, il y avait bien plus de bons copains qui partageaient le pain, que de bonnes copines qui ne partageaient rien, dans cette religion « macholique ».

Le problème c’est que c’est contre-nature et qu’ils ne peuvent pas avoir d’enfant ? Alors interdisons le mariage aux stériles, aux vieux et à Christine Boutin, qui et je suis sûr que je vous l’apprends est mariée à Louis Boutin qui n’est autre que son cousin germain avec qui, elle a 3 enfants.

Le problème c’est que un enfant élevé par des homos, sera nécessairement homo ? Alors, ouf, tous les enfants de couples hétéros seront aussi forcément hétéros, mais ça se saurait.

Le problème c’est que notre société n’est pas préparée à un tel changement de mentalité, de normes. Mais messieurs, en 15 ans n’est-on pas passé sans résistance du téléphone gris à cadran rotatif à un mobile qui fait agenda, Gps, dictaphone, qui vous réserve les trains et vous atrophie le pouce, vous voyez, même les téléphones sans fils.

La semaine dernière en France, Karen, 22 ans, a épousé son mari mort en 2009 à titre posthume, mariage autorisé grâce à l’article 171 du code civil. En France, pour une femme, il est donc plus facile de se marier avec de l’humus sur le ventre qu’avec un homo sur le dos, c’est pas une aberration, ça ?

Et finalement, pourquoi ce ne serait pas nous qui serions dans l’aberration anthropologique, nous, les hétéros convaincus, dont le cul convient que lorsque vint le con, nous les nostalgiques du légo, les stakhanovistes du moule-bite. Ne serait-il pas plus naturel que l’homme aille vers l’homme et la femme vers la femme. Et si l’alcoolique qui a écrit le livre de la genèse nous avait parlé de David et Johnattan ou de Véronique et Davina plutôt qu’Adam et Eve, serions nous toujours dans ce débat stupide. Serions nous encore sans cesse à culpabiliser nos tentations, de fruits défendus ou de télé plasma alors que nous pourrions simplement nous demander ce qu’on fait pour les vacances non je n’ai pas changé d’adresse ou prendre des douches à poils après la gym en faisant des « doudouyoudouyou paw paw paw paw ».

Parce que, franchement, pour un mec, vivre avec une nana, et réciproquement, ça vous semble naturel ? Tout nous oppose. Faites l’expérience. Allez chez H&M et observez le comportement d’un vieux couple, puis celui de deux vieilles copines. Vous vous rendrez vite compte que le couple dénote, n’est pas à sa place. Faites pareil avec une soirée ligue des champions – pizza – picon bière. Dans tous les cas, les couples hétéros s’emmerdent, se déchirent, les couples unisexe se comprennent, s’éclatent, s’animent, s’aiment. Et pour la procréation, la sauvegarde de l’espèce, on se débrouille, on connaitra toujours le chemin.

Alors oui, moi, je préfère les femmes, mais je suis victime d’une aberration anthropologique. Et vous savez ce qu’il m’est arrivé samedi il y a dix jours ? Je me suis retrouvé par hasard place du capitole avec mes enfants en pleine marche de la fierté dans cette foule de sauvage anthropologiquement colorée et joyeuse. Et bien, je vais vous faire rire, et bien, il nous est rien arrivé…

 

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