Chroniques

Le procés de Nicolas S. : Témoin à charge

Toi, président de la république, qui a rendu les faibles plus fragiles, les inquiets plus angoissés, les méfiants plus craintifs, je t’en veux.

Toi, président de la république, et ton terrible cortège de crève le peuple né de l’ombre et disparu avec elle, initiant la terreur en inoculant insidieusement, jour après jour, haine après arrogance, le venin de la peur de l’autre, de l’étranger, du pas comme vous, je t’en veux.

Toi, président de la répugnance, qui a banalisé la haine ordinaire, et rendu le coït anal avec le fascisme moderne, avouable et assumée, je t’en veux.

Aujourd’hui, on peut baiser avec Minute et ne pas se faire tondre dans la seconde, simplement, en se justifiant qu’on a des amis qui sont justement arabes, et une meilleure amie tchadienne, donc plus noire qu’une arabe… et pourquoi pas un chien berger allemand, donc plus couillu qu’un noir, et une maîtresse portugaise, donc plus poilue qu’un berger allemand et un sex toys à pile donc plus utile qu’une maitresse portugaise, et une photo dédicacée de Thierry Roland, donc plus raciste qu’un godemiché, la boucle est bouclée, c’est n’importe quoi, elle prouve quoi, ta saloperie de Nadine moque ??? Et encore, t’as de la chance, je suis poli, j’aurais pu être un joueur de l’équipe de France de football, mais j’aime pas le foot… mais je t’en veux, et cule aussi.

Toi président de la répugnance, quelle rancœur du passé gardes-tu de l’amour pour cultiver autant de haine ? Est-ce que personne, à un moment donné, dans ta vie, dans tes nuits, dans tes errances à Dysneyland, t’a jamais dit que le temps qui glisse est un salaud et que de nos chagrins il s’en fait des manteaux, n’y-a-t-il pas quelqu’un qui t’ait dit qu’on t’aimait encore ? Serait ce possible alors ?

Mais, toi président de la résilience, je t’en veux surtout pour ça : musique1 – James blunt you’re beautiful

James Blunt, j’en peux plus !!! 6 ans que ça dure. Et tu n’y as rien fait. Rien pour que cela s’arrête. Depuis 6 ans, tous les lundis de tous les étés, ma tête est obsédée par ce générique de « l’amour est dans le pré » qui s’inquiète des amours paysannes. Les mains dans la terre, des heures à se taire, le cœur solitaire, usé de gaspiller tous ces gosses dans les kleneex des water : agriculteur cherche colocataire salutaire.

Oui, c’est vrai, monsieur le juge, j’avoue regarder cette émission, être hypnotisé par cette mise en scène racoleuse et humiliante, j’avoue ma jouissance sadique et perverse lorsque je me sens voyeur de cette détresse sociale. Je suis happé et c’est incontrôlable. Mais je ne suis qu’une victime. Victime parmi ces autres 7 millions de personnes qui ne peuvent détourner le regard de ces lundis champêtres. Parce que derrière cette mascarade cathodique pathétique, on me rappelle que la solitude est le cancer du siècle et qu’en 5 ans, la situation s’est considérablement dégradée.

Car oui, pour toi, citoyen de l’urbain, côtoyant sans cesse les rondeurs de l’hédoniste tentation, cela peut te paraître un sujet peu préoccupant, mais pense à ces jeunes hommes et femmes qui creusent la terre jusqu’après leur mort pour couvrir leur corps d’heures de misère. N’ont-ils pas droits eux aussi à rencontrer ce genre de femme, simple et magique, qui vous fait baisser les yeux, dès qu’elle vous fait lever la queue, ce genre de femme qui, de l’œil, vous fait rétracter l’orbite quand elle vous fait dilater là, là où le cœur s’agite… 

Tu sais, je ne suis pas inquiet pour Johnny Depp qui retrouvera une poule ; ce sera plus dur pour Jean de Lozère pour trouver son paradis…

Aujourd’hui, 600.000 agriculteurs, 120.000 célibataires. L’amour est dans le pré, pendant ton quinquennat, c’est en 2007 : 3 millions de téléspectateurs, en 2009, 5 millions, en 2011, 7 millions. Les gens s’identifient, l’exclusion s’intensifie, et ton mépris : 5 ans suffisent. Ce n’est plus du voyeurisme. C’est du désarroi.

Le taux de suicide chez les agriculteurs est trois fois plus élevé que chez les cadres. C’est un cercle vicieux. Les exploitations disparaissent, les cantons se vident, les rencontres deviennent impossibles, les exploitations disparaissent, et dans 10 ans, on ne mangera que du lait en poudre et des steaks à chier.

Et tous les lundis soir, pour ne pas oublier, je me sens obligé de me taper James Blunt, qui n’est pas prêt de disparaître, lui : musique2 – James blunt you’re beautiful J’en peux plus : you’re beautiful, you’re beautiful, it’s true. Ton trou est beautiful, mais crèves-y seul. Monsieur le juge, Nicolas S. s’est toujours plus préoccupé des caméras des villes, que des diasporas des champs.

 

Nicolas S., à force de semer du blé, ils ont le cœur qui s’épuise, mais à force de s’aimer soi-même on a le cœur qui méprise.

 

Ainsi, je te reproche d’avoir autant isolé les hommes en ne cessant de penser que les sentiments c’est pas pour maintenant mais que l’amour est dans l’après.

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